Lundi 6 août
En août, le blog est out.
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Samedi 4 août
Livre de la semaine
Palafox
Eric Chevillard
Les Editions de Minuit
« Certes, à première vue, tout laisse à penser que Palafox est un poussin, un simple poussin puisque son œuf vole en éclats, un autruchon comme il en éclôt chaque jour de par le monde, haut sur pattes et le cou démesuré, un girafon très ordinaire, au pelage jaune tacheté de brun, un de ces léopards silencieux et redoutables, volontiers mangeurs d’hommes, un requin bleu comme tous les requins bleus, assoiffé de sang, en somme un moustique agaçant de plus, avec sa trompe si caractéristique, un éléphanteau banal, mais bientôt on se prend à en douter. Palafox coasse. Palafox nous lèche le visage et les mains. Alors nos certitudes vacillent. Penchons-nous sur Palafox. »
Éric Chevillard
« Étrange et fascinant projet que celui d’Éric Chevillard. À toute allure, il nous entraîne sur les traces de sa créature polymorphe. Les savants, les chasseurs, les victimes de Palafox se joignent à nous dans cette quête essoufflante. De digressions en rebondissements, on galope, médusé, à travers un récit stupéfiant. Le rire éclate, la surprise enchante, le projet déconcerte : que veut Chevillard ? On peut évoquer Pinget, Queneau, Michaux, Perec : aucun modèle ne va vraiment à cette écriture d’une habileté confondante, d’une drôlerie irrésistible et méchante, d’un élan qui entraîne : suivons Palafox ! »
Isabelle Rüf (L’Hebdo, décembre 1990)
Vendredi 3 août
« La vie est une hésitation entre une exclamation et une interrogation. Dans le doute, on met un point final. »
Fernando Pessoa
Que peut-on faire à 60 ans de plus stimulant, de plus nécessaire et de plus vital que de préparer soigneusement son suicide?
La phrase précédente est évidemment un idéal; dans la réalité, la plupart des gens acceptent sans sourciller de vieillir sur un bateau de croisière Costa.
Titien, Les trois âges de l’homme
Jeudi 2 août
« Aujourd’hui, la barbarie esthétique réalise la menace qui pèse sur les créations de l’esprit depuis qu’elles ont été réunies et neutralisées en tant que culture. Parler de culture a toujours été contraire à la culture. »
Max Horkheimer et Theodor W. Adorno
J’ai toujours eu une haute opinion de mon insignifiance.
Fragonard, Portrait du duc d’Harcourt
Mercredi 1er août
« Une fois que ma décision est prise, j’hésite longuement. »
Jules Renard
J’ai toujours paru plus jeune que je ne l’étais réellement; à 5 ans, on me donnait à peine 6 mois et je me réjouis à l’idée que personne ne croira à mes 100 ans pensant que je suis davantage proche de 95.
La canicule arrive, les touristes héliotropes vont peut-être passer à l’ombre.
Van Gogh, Les tournesols
Mardi 31 juillet
« Surpris avec une jambe de jeune femme dans son assiette et poursuivi en conséquence pour cannibalisme, il prétendit devant le juge qu’il était en train de manger des cuisses de grenouilles et que la dernière avait soudainement pris cette forme au contact de ses lèvres. la jurisprudence parlait pour lui et il fut acquitté avec les félicitations du jury et des excuses de la cour. »
Eric Chevillard
Les rideaux devant les fenêtres d’été se gonflent à la moindre brise et se donnent des airs de voilier en haute mer. Les regarder vous donnent à peu de frais le teint buriné d’un skipper solitaire.
Turner, Bateaux hollandais dans la tempête
Lundi 30 juillet
« On parle toujours des arrières-saisons, avec ses grands hôtels vides, aux volets clos, et ses plages désertes. L’avant-saison, c’est l’été pour moi tout seul. J’y suis […] ça a été! L’été est la seule saison qui se conjugue au passé avec ses couleurs passées, ses parasols décolorées, sa terre battue, lasse de pas perdus, et ses brises pastellisées. »
Jean-Edern Hallier
Il a le charisme d’un bulot et le QI d’une huître, ce qui le rend irrésistible auprés des palourdes.
Eugène Boudin, Plage à Trouville
Samedi 28 juillet
Livre de la semaine
La confusion des sexes
Michel Schneider
Flammarion
«Celui qui promettra à l’humanité de la délivrer de l’embarrassante sujétion sexuelle, quelque sottise qu’il choisisse de dire, sera considéré comme un héros» prédisait Freud, en 1914.
En polémiste incisif, Michel Schneider nous montre, dans « La Confusion des sexes », que la sottise s’est emparée du discours contemporain. On peut lui reprocher, comme le fait la presse, ses excès, mais s’agit-il vraiment d’excès ? Michel Schneider est le seul à oser écrire ce que certains pensent en sourdine, préférant refouler leur audace intime, face au battage médiatique claironnant l’indifférenciation généralisée.
Comment, dans notre monde égalisé, penser le sexe, sans l’altérité ? Contre l’historique domination masculine, le tsunami désexualisant, sur lequel surfe l’écrivain Frédérik Pajak, s’énonce ainsi : « Je suis un homme d’aujourd’hui, c’est-à-dire une couille molle ». Dans son désir de faire taire l’éternel malentendu homme-femme, la tentative politique d’arasement des différences s’attaque à cet archaïsme qu’est la sexualité masculine.
Ainsi, en nous délivrant du mâle, les nouveaux moralistes s’appuient sur le déni de la relation entre les sexes » pour dénouer l’assise symbolique de ce rapport impossible. Ils infirment les propos de Baudelaire, dans « Mon cœur mis à nu » : « Le monde ne marche que par le malentendu. C’est par le malentendu universel que tout le monde s’accorde. Car si, par malheur, on se comprenait, on ne pourrait jamais s’accorder ».
Funeste désymbolisation qui, en supprimant l’interdit, dans un vaste mouvement de délégalisation, fait entrer les interdictions nouvelles et infinies, dans la sphère privée, judiciarisant la sexualité, pénalisant certains comportements dits déviants, diabolisant certaines pratiques politisant les rapports, et… féminisant les mots eux-mêmes.
On comprend pourquoi les politiques ont l’heur d’inspirer Michel Schneider. Sans doute ne lui pardonneront-ils pas ce genre de phrase : « Députés ineptes et ministres malhabiles (…) lancent dans la nuit les signaux de leur détresse idéologique ». En ces temps de campagne présidentielle, où se joue l’élection à une fonction, oh combien symbolique, l’interrogation de Michel Schneider n’est pas sans intérêt. Elle nous enjoint de ne pas confondre féminité et féminisme. Le polémiste est féroce avec Marie Ségolène Royal, « petite mère des gens », « candidate de l’insoumission », promise dans ses propos mêmes, à la gestion de notre « caserne libertaire ».
On peut, pourtant, regretter que ses agressions contre le « socialisme moral et politique », si elles se justifient par la désexualisation masculine, ne visent qu’une orientation politique. Cet arasement du désir qu’illustrent les propos de Michel Schneider, se retrouve à l’intérieur de chaque famille politique et se moque de la fausse différence droite-gauche instrumentalisée par les médias dans la lutte pour la présidence. Marie Ségolène Royal n’est que le symptôme d’une époque dont les modes tentent de manipuler le patrimoine symbolique par la désexualisation masculine, jouant avec une arme de destruction humaine massive, plus dangereuse encore que le nucléaire , «le narcissisme de masse égalitaire et individualisé » vectorisant habilement le discours courant contemporain.
C’est le mérite de Michel Schneider de refuser de se taire. Il nous montre les ravages que peut produire la politisation des pratiques sexuelles quelles qu’elles soient. 0r, au détour d’une note de bas de page, il relève un lapsus dans le nouveau discours moraliste, à propos du maître-mot d’homophobie : Alors que celui-ci devrait désigner la peur ou la haine de celui qui aime le même, le mot est employé par nos progressistes auto-destructeurs, à contresens, puisqu’il signifie peur ou haine du même !
L’espoir, quant à l’avenir de l’humanité, peut renaître d’un lapsus !
G. Rousseau
Vendredi 27 juillet
« Il a certes consacré deux ans à l’écriture de ce livre. Mais la bouse est le produit d’une longue et lente rumination. »
Eric Chevillard
Vu l’appétence des moustiques pour ma peau, j’envisage la création d’un nouveau service à la personne. Je propose en effet de protéger votre sommeil ou vos soirées prés d’un plan d’eau par ma seule présence. Je recrute deux, enfin trois autres aimants à vampires et nommerai cette association les trois moustiquaires. Nos tarifs bientôt sur ce blog…
La perfection existe aussi dans la laideur qui propose peut-être plus de diversité et de créativité que la beauté.
Quentin Metsys, Femme grotesque
Jeudi 26 juillet
Perdre
Mais perdre vraiment
Pour laisser place à la trouvaille.
Apollinaire
La pesanteur provoque les plis, les rides, les poches mais aussi rend les pensées moins légères, les propos plus graves, les rêves plus terre à terre. Les paupières déja s’affaissent et l’oreille tombe; bientôt rejoindre le sol sera la seule perspective. Quel soulagement que de ne plus lutter contre l’évidence, de ne plus voleter lourdement, de ne plus faire l’autruche et enfin ramper dans la glaise qui nous modela.
Saraceni, La chute d’Icare